Un mètre linéaire de poésie dans toutes les bibliothèques de France

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Bonjour à tous,

Traversant les bibliothèques des villes et des villages pour mes lectures ou rencontres, j’ai pu constater que certaines de celles-ci possèdent peu de livres de poésie ou même pas du tout ! Je me souviens d’une discussion dans le Jura avec une bibliothécaire bénévole. Lui faisant remarquer qu’il n’y avait pas de poésie dans son lieu, elle m’avait répondu, il n’y en a pas parce que la poésie ne se lit pas…

Une bibliothécaire, plus que rétive, bénévole ! Et cela lui donne sans doute le droit de suspecter les écrivains de gagner de l’argent. Elle a raison, elle qui n’écrit pas, lit à peine, mais gère ce que le village désire lire. Elle le sait, elle le sent, elle l’exprime. Ce n’est pas la peine de mettre de la poésie dans les rayons puisqu’ils n’en lisent pas. D’ailleurs moi non plus ! Mieux qu’un syllogisme. Le théâtre idem et puis ici, c’est pour la détente. En tant que chasseur de primes je souris de son dernier mot, la main sur la crosse de mon stylo plume. 

Ce texte extrait de CHASSEUR DE PRIMES paru aux Éditions La Passe du Vent paraît excessif, mais pas dans cette bibliothèque … J’ai eu cette idée de mètre linéaire, une sorte de minimum poésie, comme une plaisanterie, à Villevêque en Anjou. Il faudrait, au moins, un mètre de poésie dans toutes les bibliothèques de France ! Florence, la directrice de la bibliothèque de Villevêque m’avait répondu, pour nous c’est bon ! On en a même plus…Anne Pozzan et Christine Trangosi, bénévoles de la bibliothèque de Briollay, une ville voisine, m’ont dit trois mois plus tard, nous sommes entrain de réaliser ce mètre de poésie dans notre bibliothèque. Très ému par cette annonce, c’est donc grâce à elles trois, que je diffuse cette plaisanterie: MINIMUM UN MÈTRE LINÉAIRE DE POÉSIE DANS TOUTES LES BIBLIOTHÈQUES DE FRANCE. Nous avons tous conscience qu’un mètre c’est peu. Nous savons que la rentrée littéraire n’est jamais poétique ou théâtrale. Mais un mètre c’est déjà ça, c’est vite dit et c’est vite fait. On peut même imaginer que certaines bibliothèques répondront, mais chez nous, c’est trois, quatre, cinq, six mètres que nous avons ! Et puis, à tous ceux qui pensent que de mesurer la poésie au mètre est vulgaire je leur conseille de lire la définition de l’humour et celle de la réalité des faits.

Certaines bibliothèques rétorquent aussi le manque de place pour installer la poésie, comme si les autres livres et formes d’écriture devaient passer avant, étaient prioritaires…alors pourquoi ne pas accrocher l’étagère au plafond ! La poésie se sent bien au plafond, et monter sur une chaise pour la décrocher lui portera bonheur.

Je vous remercie tous d’avoir parcouru cette plaisanterie, et si cela vous amuse vous aussi, vous pouvez la faire circuler où elle aura le plus de succès de convaincre et gagner du terrain pour le futur de l’esprit et de la langue.

Fin 2014

Post-scriptum novembre 2015: comme suggéré dans de nombreux courriels et courriers, de lecteurs intéressés par ce MÈTRE LINÉAIRE DE POÉSIE DANS TOUTES LES BIBLIOTHÈQUES DE FRANCE… de poètes et non poètes, d’enfants, de professeurs, de fonctionnaires pénitentiaires, d’instituteurs et institutrices, de médecins, de travailleurs en tous genres… appliquons ce mètre et plus : aux Écoles, aux Prisons, aux Hôpitaux…et aux LIBRAIRIES !

Joël Bastard

 

INFORMATION : Annulation d’ateliers

En raison de problèmes de santé, l’auteur Joël BASTARD est contraint d’annuler sa dernière semaine de résidence en novembre 2015.

Les activités prévues sur la semaine du 23 novembre n’auront donc pas lieu.
Cela inclut les ateliers d’écriture du samedi 21 à la bibliothèque de Meillac et du samedi 28 à la bibliothèque de Saint-Pierre-de-Plesguen.

Ces séances sont reportées en février-mars 2016.

Souhaitons à Joël un prompt rétablissement !

Le grand labour

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Le paysan sait ce qu’il a à faire. Il entame son immense territoire sans se poser plus de questions qu’il ne faut pour actionner sa machine. Il n’a que ça à faire et aujourd’hui il ne sait faire que cela, labourer cet immense territoire. Je suis comme lui, le soc de mon stylo planté dans le blanc de la page. Un jour nous resterons assis côte à côte devant la petitesse de quelque chose et aurons oublié le ciel qui éclaira notre vie.

 

Le grand cahier bleu Héraclès

 

Au 22 allées des Irlandais, à Massy-Palaiseau, je vivais au 4ème étage d’une HLM immensément longue. Un jour d’ennui, je devais avoir 10 ans, j’ai jeté de mon balcon ma collection de portes clefs. 1000 porte-clefs de toutes les formes et de toutes les couleurs. En bas, dans le terrain vague, des dizaines d’enfants se bousculaient sur les brillants. Je comprends seulement aujourd’hui que je distribuais à qui veut des poèmes avant même d’en écrire. J’étais si seul avec ma collection ! J’ai gardé, depuis, un grand cahier bleu Héraclès dans lequel un instituteur de CM2 m’a fait écrire au propre et en écriture scripte, des poèmes de  François Villon, Guillaume Apollinaire, Rutebeuf, Paul Eluard, Molière…et celui-ci du philosophe Alain.

La poésie est la clef de l’ordre humain et comme j’ai dit souvent le miroir de l’âme. Mais non pas la niaise poésie, que l’on rime exprès pour les enfants. Au contraire, la plus haute poésie, la plus vénérée. Là-dessus on trouve souvent à dire que l’enfant ne comprendra guère. Sans doute il ne comprendra pas d’abord. Mais la puissance de la poésie est en ceci, à chaque lecture, que d’abord, avant de nous instruire, elle nous dispose par les sons et le rythme, selon un modèle humain universel. Et cela est bon aussi pour l’enfant, surtout pour l’enfant.

Extrait de UN FRANÇAIS-FRANÇAIS À VAULX-EN-VELIN

à paraître aux éditions La Passe du Vent début 2016